Je n'ai pas vu la ville aux monceaux de chair
je suis passé au travers du bruit
du frottement des âmes vieilles guenilles
et des cris du métal
sans même m'en apercevoir
un organe vert oublié tentait de ramper depuis
le cadavre des égouts jusqu'à la cime stérile des immeubles
coude-à-coude avec la pestilence
des charmes et des danses
je n'ai pas vu la ville aux monceaux de chair
où la lumière se plaque au brouillard
pour dessiner tout ce qu'on peut imaginer
quand on cahote la nuit de bars en épiceries
en mal de trouver l'ailleurs tout près
au bout des doigts, la vie en crépi, l'amour en string
flottant dans les stridulations d'un vent de néant
j'emportais tout, j'emportais rien
ma rage assoiffée d'aller de l'autre côté
je n'ai pas vu la ville aux monceaux de chair
quand dans le ventre grouille un gel voluptueux
j'ai couru à m'en oublier
jusqu'à l'embouchure labiale d'une blonde où dansait
un serpent au bout d'un bâton
moi, j'ai vu un autre poète pendu à une fleur rouge
et le sexe livide s'est décomposé dans le remugle des déchets
au final, mieux vaut chanter parmi les fous
j'ai voulu visiter tous les nulle-part
je n'ai pas vu la ville aux monceaux de chair
mais des esprits ton sur ton
noyés dans le bitume des actions éternelles
masturbant leur essence en guettant l'Apocalypse
je n'ai pas vu la ville aux monceaux de chair
mais des grottes dans les grottes avec des portes au fond
qui cachent des carcasses honteuses d'enfants bonzaï
avec en main de vieux bons de réduction
je n'ai pas vu la ville
mais un délire très mince
qui ne voilait rien des secrets ensablés
quand la brume et la marée se retirent en riant
je n'ai pas entendu parler
mais un long chuintement à écoeurer les pavés
et sous l'auscultation des précieux lampadaires
comme un écho sans fin sous la chair